Traditions Bressanes / Lieux de mémoire, mémoires des lieux…
La descendance d’Antoine De Mailly 5 novembre
2010
Riche possesseur terrien, Antoine De Mailly eut l’idée en 1787
de faire édifier une belle résidence en pierre de taille sur ses terres de Châteaurenaud,
à l’emplacement du château fort originel. Problèmes de successions comme le
laisse supposer Lucien Guillemaut, Révolution Française ou autres aléas politiques,
toujours est-il que les travaux de la demeure ne furent jamais totalement achevés
et cette dernière fut vendue en 1826 puis démoli de 1827 à 1835 afin de servir
de « carrière » de matériaux.
Marquis de Châteaurenaud, seigneur de Seugny,
Mons et La Tournelle, de Quintigny…, Antoine De Mailly qui faisait partie avant
la Révolution de la Chambre de la Noblesse de Comté, se montra par la suite
adversaire des privilèges : il vota notamment pour la mort de Louis XVI. Après
avoir été, entre autres, administrateur puis président du Directoire de Saône-et-Loire,
député au Conseil des anciens et maire de Vesoul, il se retira sous la première
Restauration dans son château de Franchevelle et y mourut en 1819 à l’âge de
soixante-dix-sept ans. Une rue de Vesoul porte désormais son nom.
Côté famille,
Antoine De Mailly épousa à vingt-six ans Claudine-Alexandrine de Damas dont
il eut neuf enfants (sept fils et deux filles) : après onze années de mariage,
il se retrouva veuf et épousa en secondes noces Anne-Rosalie Receveur dont il
eut douze enfants. Malgré cette « abondante » progéniture, le nom de De Mailly
se perdit (aucun fils n’eut de descendance) mais le sang des De Mailly continua
à couler par le biais, notamment, des filles qu’Antoine eut de son deuxième
mariage.
Des familles importantes de Louhans en furent les témoins, à l’image
des Guillemin (Alexandre Guillemin, maire puis Conseiller général de Louhans)
où encore des Pernet dont est issue la bienfaitrice de l’Hôtel-dieu, soeur Noémie-Palmyre
Pernet dont le buste accueille encore aujourd’hui les visiteurs de l’édifice
louhannais. Enfin, les Guillemaut sont également les descendants d’Antoine De
Mailly : l’une des filles de ce dernier (Anne-Félicie) épousa Jean-Joseph-Philibert
Guillemaut et donna naissance à Eugène Guillemaut, père de Lucien Guillemaut.
La boucle est bouclée.
Le
château de Châteaurenaud dessiné d’après la description mentionnée dans son
acte de vente. (Illustration extraite de Armoiries et familles nobles de
la Bresse louhannaise, Lucien Guillemaut, Réédition de l’ouvrage de 1909
par l’Ecomusée de la Bresse bourguignonne, 1988 (page 133).)
La « Place de la Charité » 12 novembre 2010
Après
cet aparté concernant la famille de Mailly (bien trop court tant la destiné
des personnages qui la formèrent fut heureuse et variée), reprenons la rue Lucien
Guillemaut pour aboutir à la « place de la Charité ».
Comme à l’accoutumée,
les locaux ont rebaptisé cette place, «Place de la Poste », « Place de la Halle
», « le Breuil »… Place de la poste tout simplement car le bureau de poste louhannais
se trouve aux abords de cette place. Place de la Halle depuis qu’une halle contemporaine
reprenant quelques éléments de l’architecture bressane a été érigée sur cette
place, modifiant également la circulation et le stationnement qui s’y faisaient.
Enfin, le Breuil en souvenir de l’usage ancien de cet endroit à savoir un lieu
de chasse réservé au seigneur de la ville à l’époque médiéval.
Le nom de
« Place de la charité » vient de l’implantation en 1733 d’une « maison de Charité
» destinée à recueillir les jeunes filles pauvres de la ville. Avec le temps,
ce bâtiment devint un collège de jeunes filles et se trouva implanté face aux
jardins de l’hôpital, en lieu et place de l’actuelle mairie.
Nous avons
déjà évoqué l’aménagement d’une promenade en ce lieu, « la Promenade de la Charité
», axe parallèle à la Promenade des Cordeliers, de l’autre côté de la
ville. C’est en cet endroit que se tenait également la foire aux chevaux. Aujourd’hui
encore, la Place de la Charité est le théâtre chaque lundi matin du marché aux
volailles, et un lundi sur deux du marché aux bestiaux.
Un jour ou l’autre, la halle (parfois appelée « halle à girafes »…) fera elle aussi partie du patrimoine et de l’histoire urbanistique de Louhans.
Quelques édifices encore 19 novembre 2010
Entre
les deux promenades de Louhans (celle des Cordeliers et celle de la Charité),
se trouve la rue des Bordes. Nous avons déjà eu l’occasion de parler de son
origine étymologique, les bordes étant des fermettes isolées des bourgs et villages.
Cette rue, comme la plupart des rues rayonnant autour du cœur historique
de Louhans (la rue des arcades), reflète l’urbanisation et l’adaptation de la
ville aux différents progrès en matière de transports, hygiène, etc : élargissement
de la voie, tracé rectiligne, mise en lumière… Cette rue a avec le temps pris
un aspect prestigieux du fait de sa perspective ouverte sur « le porche » qui
abritait autrefois la mairie. C’est donc tout normalement dans cette rue que
s’est installée la sous-préfecture dans les années 1810-1820 : elle se trouvait
à l’emplacement de l’actuelle mairie de Louhans. Côté enseignement, un collège
de garçons fut construit dans les années 1830 dans ce qui est aujourd’hui l’hôtel
des Impôts et jusqu’au 20ème siècle, la rue des Bordes a été le lieu privilégié
pour accueillir écoles et institutions louhannaises (représentants de l’ordre,
de l’Etat, politiques…).
A l’extrémité de la rue des Bordes, sur la place
longeant l’actuelle maison de retraite Pernet, se dresse encore avec élégance
le kiosque à musique de la ville. Typique de l’ambiance festive qui régnait
alors à la Belle Epoque (période allant de la fin du 19ème à la première guerre
mondiale) et de l’aménagement des villes, le kiosque de Louhans présente le
même plan que la majorité des kiosques européens. Le plancher auquel on accède
par un escalier est surélevé afin que les musiciens, fanfares ou autres harmonies
qui s’y produisaient soient vus, mais surtout entendus de tous. Une balustrade
court autour de ce socle octogonal abrité par une haute toiture que supportent
de fines colonnettes ; des lanternes sont suspendues à la charpente et une lyre
surmonte le fait de la toiture. Le métal alors en vogue à la Belle Epoque trouve
dans les kiosques à musique comme celui de Louhans une utilisation harmonieuse
et raffinée.
Le kiosque à musique de Louhans retrouve son esprit d’antan
à l’occasion
de la fête de la musique ou de quelques représentations musicales.
La Bressane 26 novembre 2010
Depuis
plus d’un siècle, une jeune femme en sabots a fait de la Place de la Charité
sa demeure. Communément appelée « la Bressane », cette jeune femme rappelle
la mémoire des Bressans morts pour la France lors de la guerre de 1870.
Elle
est évoquée ainsi par Marcel Pacaut dans son ouvrage « Louhans des origines
à nos jours » (Editions Horvath, 1984) : « Mérite d’être signalé pour sa facture
assez typique et à cause de la rareté des stèles édifiées en souvenir de ce
conflit ».
La guerre de 1870 opposant la France à la Prusse et marquant la
victoire de cette dernière et de ses alliés germaniques, occasionna de nombreux
morts sur les champs de bataille. Assez rapidement après l’arrêt des hostilités,
les défunts furent honorés par des tombes et des monuments commémoratifs sur
les lieux mêmes des combats et dans des cimetières proches. Par la suite, les
villes et villages de France honorèrent leurs enfants en édifiant des monuments
aux morts au cœur des bourgs.
La forme la plus commune de ces monuments est
l’obélisque, portant sur ses faces (une seule ou plusieurs en fonction de la
l’importance de la liste des noms à y inscrire) les noms et prénoms des hommes
tombés au champ de bataille et une dédicace : ici, « La Bresse louhannaise à
ses enfants 1870-71 ».
Si la forme (l’obélisque), et les ornements sont
courants (la Bressane tient d’une main un drapeau symbole de la nation, et de
l’autre une palme, symbole du martyr), la figure de la Bressane est à remarquer.
C’est une fille « bien de chez nous », en sabots et en tablier qui remplace
les traditionnelles figures de soldats ou femmes éplorées. L’air triste mais
oh combien noble, elle gravit le monument pour y accrocher la palme des défunts,
quitte à y perdre l’un de ses sabots.
La Bressane honore la mémoire de ses frères tombés pour la France lors du conflit de 1870.