Traditions bressanes / Lieux de mémoires, mémoire des lieux
Le spirituel et le temporel 5 février 2010
Devenus
« propriétaires » de la villa, les moines y établissent assez rapidement un
prieuré, symbole de leur présence et de leur fonction spirituelle. Pour les
avantages temporels, ils installent un port sur la Seille afin de tirer profit
du sel naviguant sur la rivière depuis les salines du Jura.
Les habitants
les plus pauvres de la cité profitèrent directement des revenus de ce péage,
les moines instaurant une distribution de sel gratuite durant la semaine du
Carême. Peu à peu, c’est la villa en général qui tire les avantages du port
et de ses revenus : le village devient bientôt un bourg, un « vicus », siège
d’un petit commerce régional lié au sel puis de quelques autres marchandises.
C’est ainsi que débute la vocation commerçante de Louhans, vocation qui structurera
son urbanisme.
Pour leur alimentation, celle de leurs serviteurs et fermiers,
les moines créent également un four et des cuisines, dont les usages seront
repris par la suite par les seigneurs successifs de la ville. D’après les recherches
de Marcel Pacaut, ils laissent en prairie le pré s’étendant de l’église au Solnan
(« le Breuil ») mais cultivent d’autres terres plus à l’intérieur de la ville
et établissent leurs paysans dans de petites fermettes appelées « bordes »,
à l’emplacement de l’actuelle « rue des Bordes ».
Un quartier de Louhans
vient donc de se créer, Louhans qui est alors entièrement tournée vers son port
et dont le deuxième cœur est l’église saint Martin entouré de son cimetière.
L’actuelle rue des Bordes se trouve à l’emplacement d’anciennes fermes et tenures.
Les seigneurs de Vienne 12 février 2010
Aux
11ème et 12ème siècles, des seigneuries commencent à s’instituer, à prendre
de l’importance et à asseoir leur autorité dans des bourgs. Louhans est alors
un bourg relativement prospère, à la qualité commerçante reconnue, toujours
aux mains des moines de Tournus : ces derniers possèdent des droits seigneuriaux
en matière de justice, de taxation et de réquisition.
Au milieu du 12ème
siècle, le comte Mâcon Girard de Vienne, seigneur très puissant, souhaite contrôler
la circulation du sel du Jura jusqu’à la Saône, sa femme possédant la seigneurie
de Salins ainsi que les mines de sel. Il acquiert peu à peu des terres aux alentours
de Louhans et y installe un dépôt de sel : naît ainsi une querelle entre la
famille de Vienne et l’abbaye de Tournus.
Au cours des successions et mariages,
la famille de Vienne puis d’Antigny devient propriétaire en 1255 de la seigneurie
de Sainte-Croix dont les terres s’étendent aux portes de Louhans. La famille
possédant également des terres à Sornay et à Bruailles, les moines se retrouvent
en position de faiblesse, enclavés à Louhans.
En 1269, ils cèdent à la famille
d’Antigny le pouvoir seigneurial qu’ils exerçaient jusqu’alors sur Louhans mais
y conservent tous leurs biens fonciers et immobiliers avec leurs revenus.
Les seigneurs d’Antigny, issus des anciens comtes de Vienne,
avaient pour blason de sable à croix d’or
(source : Lucien Guillemaut).
En 1269, déjà le marché… 19 février 2010
C’est
l’un de ces seigneurs de Vienne, Henri d’Antigny, qui donne en 1269, ses franchises
à la ville de Louhans. S’inscrivant dans une mouvance générale (Branges, Cuiseaux
et Sagy ont déjà leurs chartes d’affranchissement depuis quelques années), ce
dernier exempt les habitants de la cité de la plupart des droits féodaux auxquels
ils étaient redevables jusqu’alors.
Au détour de ce texte écrit en roman
(langue vulgaire au sens propre c’est-à-dire parlée par le peuple), on trouve
la mention des « étaux de notre halle du marché de Louhans » (« marchie de Loans
» dans le texte). Premier élément d’existence textuel, ce dernier laisse supposer
que le marché est présent à Louhans depuis quelques temps déjà, et ce dû à la
position antique de la ville en tant que carrefour commercial.
Mais c’est
aux 14ème et 15ème siècles que le marché de Louhans et ceux de Bresse en général
prennent une réelle importance, se développant et animant la région. Peu à peu,
grâce aux droits payés sur ses foires et marchés, à l’implantation de commerces
ou encore aux profits de l’octroi, Louhans s’enrichit, favorisant ainsi la construction
des maisons de la Grande Rue. C’est à partir de cette période florissante, le
16ème siècle, que les échoppes de la rue vont s’agrémenter des premières arcades.
De
quelques-unes, les arcades deviennent 157, telles qu’on les connaît actuellement.
Lorsque vous flânerez prochainement sous les arcades de Louhans, imaginez-les
habillées de leurs échoppes médiévales… Vous marcheriez sur les pavés, au centre
d’une Grande Rue encombrée de mulets et chevaux tirant des charrettes. Regardez
bien où vous marchez mais levez aussi la tête : immondices et eaux usées pourraient
bien être jetés directement par les fenêtres des maisons surplombant les arcades…
Aujourd’hui encore, Louhans est animée chaque lundi matin par son marché.
157 arcades, une grande variété de style et d’époque… 26
février 2010
Lorsque l’on flâne sous les arcades de Louhans aujourd’hui,
on perçoit tout d’abord cette succession d’arches, d’arcades, habillant la grande
rue de la ville.
Au nombre de 157 actuellement, la construction de chacune
d’entre elles et des maisons les surmontant s’échelonne depuis environ 1480.
Ces arcades permirent d’abriter les échoppes des commerçants très actifs dans
cette rue.
Les devantures se composaient d’un système de volets décrit par
Lucien Guillemaut : « Il y avait de nombreuses boutiques, toutes à lourds volets
de bois faisant corps avec la devanture et s’ouvrant horizontalement par le
milieu : celui d’en bas s’abaissait, celui d’en haut se relevait et ils étaient
maintenus par des crochets ; celui d’en bas recevait des marchandises et celui
d’en haut abritait l’étalage. » D’après lui, ce procédé fonctionna jusque dans
la première moitié du 19ème siècle. En était-il de même à Cuiseaux où la rue
saint Thomas arbore elle aussi quelques arcades à vocation commerçante ? Sans
doute.
S’il est attentionné, le promeneur remarquera tout d’abord la diversité
de formes et de matériaux constituant les arcades de Louhans : la plupart sont
en pierre, parfois en calcaire de Préty, pierre rose dans de grandes dalles
forment le sol des arcades. D’autres sont en bois, piliers mais aussi plafonds,
vestiges des anciennes arches médiévales. Quasiment chaque arcade possède sa
cave dont l’accès est matérialisé le plus souvent par une double porte métallique.
Enfin, les maisons constituant la partie haute des arcades relèvent d’une
variété infinie : large façade ostentatoire de la Caisse d’Epargne, petit édifice
en pans de bois ou encore loggia de style colonial…
La cité des arcades est riche de diversité.